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La Gazette de Triniach
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24 octobre 2021

Les moulins de LATOUR

 

         Avant de commencer mon propos, permettez-moi un brin d’histoire, et le rappel de quelques dates pour vous situer le contexte et vous permettre ainsi de mieux appréhender l'histoire de nos moulins.

       Dès le début du XIVe siècle plusieurs moulins sont mentionnés à Latour de France. Il s’agit de moulins banaux, aux mains des familles seigneuriales du village : dans un premier temps, les vicomtes de Fenouillet puis, par lettre patente du 2 décembre 1342 et saisine de la seigneurie par le roi de France Phillipe VI de Valois qui donne la localité de La Tour de France à Bernard Guillaume du Vivier qui ainsi en devient le premier seigneur.

      En 1307, une concession royale autorise le creusement du canal de Latour de France (canal dit de La Balme). Sa prise d’eau est sise en amont du confluent de l’Agly avec le ravin des Canorgues / Chanoines à Planèzes. Les travaux furent initiés vers 1330 par Bernard-Guillaume du Vivier. C’est d’ailleurs à cette époque que fut creusé le tunnel de la Balme permettant d’amener l’eau de l’Agly (le fleuve royal) coulant bien en dessous du village, jusqu’aux moulins situés en contrebas de celui-ci. 

      Guillaume de Belcastel réaménagera le canal de la Balme en 1443.

 

 

L'histoire de nos moulins

     Un document en latin du fonds de la sénéchaussée de Carcassonne daté de 1389 (ADPO, 80 Edt I. 1389), mentionne l’hommage rendu au Roi de France par Gaillarde du Vivier, qui tient pour ce dernier un moulin à farine, un moulin drapier et un moulin à huile.

     En 1539, la seigneurie est aux mains de Jean de Voysins, également seigneur d’Arques : un document mentionne un moulin bladier (item le moli del blat...) et un moulin à huile (item le moli del oli…). C’est à cette époque que les premiers baux conservés, dans les minutiers des notaires du Fenouillèdes, ou rapportés par les historiens, nous apportent quelques précisions sur les moulins de Latour.

 

 

PROPRIÉTAIRES, BAILLEURS, FERMIERS, ET FAMILLES DE MEUNIERS

 

        Le 6 janvier 1760, Blaise de Montesquieu adresse au marquis de Roquefort une dépêche pour l’informer, entre autres, que le fermier Louis Trilha a réglé l’afferme des moulins, cette dernière se montant à 2028 livres.

         Le 26 novembre 1765, la seigneurie et les moulins de Latour de France sont affermés à Bernard Trilha, « burgès » et négociant de la ville de Perpignan, pour une durée de 6 ans à compter du 1er septembre 1764 moyennant la somme annuelle de 5300 livres.

         Dans une lettre en date du 11 juillet 1770, M. Mailhaux, l’agent de M. de Montesquieu lui conseille de ne pas donner suite à l’offre du dénommé Sibioude, qui propose 6000 livres pour le prochain bail de la seigneurie.

         Deux mois après, le bail est renouvelé pour 7 ans à compter du 1er septembre 1770, à Louis Trilha, et à Marc Bierne, moyennant la somme de 6000 livres, (AD Aude 7 J 29).

        Pierre-François D’Hautpoul époux de Marie de Montesquieu, afferme, le 1er septembre 1777 la seigneurie et les terres à Vincent Pech, Alexis Trilha, ménagers, et Alexandre Itché, marchand de Latour, pour une durée de 6 ans moyennant une rente annuelle de 8000 livres, et 2 charges de vin, (AD Aude 7 J 55).

       Le 15 mai 1779, Marie de Montesquieu-Roquefort, épouse de Pierre-François d’Hautpoul, seigneur de Rennes-les-Bains et héritière de son frère Blaise de Montesquieu-Roquefort seigneur de Latour de France, vend la seigneurie (dont les moulins à bled et à huile avec leurs adjacences) à Joseph-Hugues d’Arnaud écuyer de Perpignan, pour la somme de 210.000 livres.

 

 

. Les d’Arnaud.

 

     Avec la famille d’Arnaud, une nouvelle ère de l’histoire du moulin de Latour de France débute Mais qui sont-ils ?

     Une étude généalogique montre que cette famille est issue du Languedoc.

   Joseph Hugues d’Arnaud et Barescut est le fils d’Antoine Arnaud, qualifié dans les actes de « Receveur de la capitation dans la Province du Roussillon ». Il décéde à Perpignan le 20 septembre 1774. Il avait épousé à Narbonne, le 29 février 1724 Marguerite de Barescut, fille d’Hugues de Barescut (Docteur en médecine de la faculté de Montpellier) et d’Anne de Gay.

  • Il est dit « Conseillé du Roi, greffier au Conseil Souverain du Roussillon et Seigneur de Latour de France ». Son fils Jean-Baptiste dit Bernard, sera conseiller de préfecture, maire de Perpignan et député des Pyrénées-Orientales entre 1809 et 1838.

     Dans l’inventaire départemental de l’an VII, un moulin est répertorié à Latour comme suis : « Nous nous sommes transportés à un moulin à farine à deux meules, à la distance de 250 mètres de Latour, sur canal d’irrigation prenant l’eau sur la rive droite de l’Agly par une digue simple en fascine, ledit canal traverse la montagne sur laquelle est situé Latour par une percée dans le rocher de 100 mètres de longueur. Ce moulin est la propriété du citoyen Arnaud habitant de Perpignan. Au fuyant dudit moulin nous avons trouvé deux meules à huile contigües, lui appartenant ».

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Moulin à huile, à meule contigu

    Cet extrait présente l’avantage de situer parfaitement le moulin par rapport au village et à l’Agly, de préciser comment il est alimenté en eau et d’indiquer qu’il est équipé de deux meules. Un moulin à huile situé en aval complète le site.

      Le moulin, sera régulièrement affermé, les d’Arnaud en seront maîtres pendant près de cinquante ans (1779-1827).

    Faisant suite à la Révolution, la destruction d’archives seigneuriales a débuté en 1789, parfois même avant. Elle intervient plus tardivement à Latour de France, au sortir d’une année périlleuse pour la République et en référence, selon le conseil communal, au décret du 17 juillet 1793 ordonnant l’abolition définitive et sans indemnité des droits féodaux et seigneuriaux.

     Le 05 janvier 1794 (16 Nivôse de l’an 2), le notaire et juge de paix Bauby, dépose au greffe de la municipalité, de nombreux actes féodaux concernant Latour, Planèzes et Rasiguères. Les actes de Rasiguères lui avaient été remis deux ans auparavant par un Du Vivier de Lansac pour qu’il soit portés à la connaissance des habitants. Agissant pour l’ancien notaire P. Gironne domicilié à présent à Perpignan, il remet aussi les actes concernant Latour, Planèzes, Bélesta et Montalba. Quelques particuliers déposent également les actes de reconnaissances qu’ils détenaient.

     Tous ces documents sont brûlés le jour même sur la place de la République, en présence du conseil général de la commune, des notables et de la population, sous les acclamations et aux cris de « vive la République, vive la Convention ».

     Quinze jours plus tard, pour fêter la prise de Toulon par les armées Républicaines, la même assemblée et les officiers municipaux, précédés d’un détachement de 18 fusiliers, suivis des notables et de la population, se rendent à la Capeillette où un feu de joie est allumé. Vingt baux emphytéotiques, ainsi qu’une transaction entre les habitants de Bélesta et leur seigneur, déposés par le même notaire sont jetés au feu.

      Il est fort probable, que les fusiliers présents à ce feu de joie, devaient appartenir au bataillon du Gard, dont certains éléments furent invités peu après, à Latour de France pour la plantation d’un arbre de la Liberté.

      En 1818, Bernard d’Arnaud propriétaire de l’ancienne seigneurie, fit référence à ces faits lors du procès avec la communauté qui revendiquait la propriété des vacants, précisant que les soldats avaient brulé les vieux papiers de la commune conservés dans un coffre, et que les titres que la commune pouvait avoir sur les dits vacants, avaient ainsi disparus, (ADPO 80 EDT 26 – délibération du 06-12-1818).

     Le sieur Arnaud se pourvoira en cassation avant de conclure un accord avec la commune qui se verra attribuer le tiers de ces vacants dont un bois de 60 ares situé au Moulin Nau, bois qu’elle exploite depuis plusieurs années.

      Une visite de tous les cours d’eau des P.O, des moulins et des usines, fût prescrite par arrêté du directoire le 19 Ventôse an VI (09 mars 1798). Effectuée à Latour de France le 2éme jour complémentaire de l’an VII (18 septembre 1799), elle mentionne que le moulin à deux meules, appartient toujours au sieur Arnaud de Perpignan, ainsi que les deux moulins à huile contigus. (ADPO 14 Sp 2. liasse 159).

     Le 20 brumaire an X (11 novembre 1808), Bernard Arnaud intente un procès au civil contre Louis Paul Coronnat, Pierre Gironne notaire, et Louis Trilha tenancier, pour manquement d’entretien du canal et de sa chaussée. La commune, assignée par les intéressés prend fait et cause pour eux, et désigne un syndic pour engager les démarches.

    Un jugement arbitral mettra fin au litige, la communauté devait un arriéré de la rente annuelle afférente à l’entretien du canal portant sur les ans IV, V et VI, estimé à la somme de 578,70 francs. (ADPO 80 EST 29 – délibération du 7 germinal an X).

     Par bail en date du 10 septembre 1810 le moulin est affermé pour huit ans à messieurs Baptiste Caux (meunier), Guillaume Rigaud (garçon meunier) habitant d’Estagel, et André Rigaud père, meunier à Bélesta-les-Peignes (Ariège) ». La rente annuelle est fixée à la somme de 2280 francs, payable au trimestre en pièces métalliques. Il s’agit toujours d’un moulin à deux meules, et sa chaussée en bon état, est constituée : « de chevalets, de barres de bois, et de fascines, bien chargées de gros cailloux ».

     Ce bail est résilié 2 ans après sans que la raison en soit connue. Bernard Arnaud renforce la capacité du moulin en y ajoutant, une troisième paire de meules.

     Le 15 septembre 1812, le moulin est loué avec un champ attenant, pour 2500 franc an et pour une durée de six ans et trois mois à messieurs Jean Bieules meunier de la ville de Quillan et Pierre Cavailler propriétaire de Saint-Paul-de-Fenouillet.

     Le 5 avril 1821 un nouveau bail donne l’affermage pour une durée de 15 ans à Joseph Casse, meunier à farine domicilié à Baho, fils d’un meunier de Salvezines (Aude), il fût meunier à Tautavel, au Soler (1806) à Baho (1818-1822) et à Latour de France, où il décèdera en 1829, sans avoir achevé son bail.

 

 

. Les Capela.

 

     Par acte du 3 avril 1827, Bernard d’Arnaud vend à part égales, le moulin et ses dépendances à Joseph Capela père et à son fils, propriétaires, demeurant à Lansac, où ils possèdent 277 ha soit 52% des terres de la commune, dont la Tour de Lansac et les terres alentours au lieu-dit le Castell. Originaire de Prats-de-Sournia, la famille Capela n’étant pas des meuniers professionnels, ils donneront le moulin en afferme.

     En 1821, Joseph Capela fils, épouse Marie Grand d’Ansignan, fille de Jean dit Pierre Grand et de Marie Pézilla. Jean, le père, est aubergiste et propriétaire du moulin de Caramany, et les frères de Marie, Joseph-Théodore, Pierre et Benoit sont meuniers à farine.

     En 1836, un autre fils de Capela, à savoir Pierre Capela, avait sollicité de la Préfecture l’autorisation de construire un moulin à plâtre attenant au moulin farinier de son père dont il utiliserait la chute. (ADPO 13 SP 26). Il obtient satisfaction. Non sans difficultés, Joseph Capela père et fils conserveront le moulin pendant seize années. Le 18 juin 1843, ils le revendront à Messieurs Léon Cyriaque Vidal et Pierre Capela, acquéreurs conjoints et solidaires.

     En 1840, un autre meunier exerce à Latour de France. Il s’agit de Simon Casenove, meunier et armurier, propriétaire du moulin à vent construit par son père Jean Casenove, au lieu-dit « le Ramier » (ADPO 80 EDT 80 – autorisation municipale du 17-09-1840).-

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Le moulin à vent du Ramier -

     Des dettes et une rentabilité du moulin à vent sans doute insuffisante, amène Simon Cazenove à vendre le 17 novembre 1850 le mécanisme à Joseph Arnaud, horloger à Port Vendres, pour la somme de 900 francs, lequel agissait, d’après l’acte de vente pour une cause autre. L’acheteur se charge de payer le prix de la vente à Anne Antoinette d’Oms, veuve d’Adrien Anglade de Perpignan, en diminution d’un capital plus important que le vendeur doit en qualité d’héritier de son père Jean Cazenove. (ADPO 3E42/197-J.B.Cussol notaire à Latour de France).

     Le mécanisme comprend, les meules, le cadre en bois dans lequel est assujettie la meule fixe, l’ariscle (tambour couvrant la meule), la trémie, la charpente soutenant le tout, la colonne dans laquelle un des axes est placé, les voiles ainsi que l’arbre qui les supporte, les roues et les engrenages divers ainsi que les ustensiles dépendant de la mécanique. Les trois poutres soutenant le plancher ainsi que les deux poutres soutenant la toiture de la bâtisse ne sont pas comprises dans la vente. Néanmoins, notre vendeur, Simon Cazenove n’abandonnait pas pour autant, la meunerie, puisqu’il avait sollicité, le 6 septembre 1849 l’autorisation de construire un moulin farinier à eau au lieu-dit du Ramier, en amont du pont routier de Latour. Deux opposants se manifestent, dont Frédéric Biscaye meunier et propriétaire du moulin existant.

      Le 11 septembre 1849, le conseil municipal de Latour se prononce contre la construction de ce nouveau moulin.

    Le maire de Claira, informé du projet par Monsieur le Préfet, intervient également le 18 septembre 1849 auprès de celui de Latour, pour souligner que si l’arrosage des terres de sa commune devait en être affecté, il s’opposerait à sa réalisation.

     Finalement, Simon Cazenove renoncera le 29 avril 1851 à cette construction.

 

 

. Les Biscaye.

 

     Messieurs Vidal et Capela n’ayant jamais payé le moulin, le recours déposé en 1843 par Joséphine Arnaud, veuve D’Uston, aboutit en 1849 à la vente judiciaire du dit moulin de Latour, du canal et de quelques terres.

     Mis aux enchères et vendu à la criée par le Tribunal civil de Perpignan lors de l’audience du 1er août 1849 : la vente nous est connue par une quittance de 310,43 francs, signé par Appolline Canavy, épouse de Pierre Capela (séparée de biens judiciairement d’avec son mari). Le tout est acquis pour la somme de 27400 francs, par Frédéric Biscaye, meunier, demeurant à Latour de France « en sa qualité d’adjudicataire d’immeubles et terres vendus au préjudice, tant de Léon Vidal, que du dit Pierre Capela ».

      Le moulin entre ainsi dans le giron de la famille Biscaye, dont les ancêtres étaient déjà meuniers à Latour de France.

     Cette famille implantée dans le village depuis le XVIIe siècle, est vraisemblablement originaire du Languedoc Les Biscaye sont des meuniers de père en fils depuis des générations tant dans l’Aude que dans les Pyrénées-Orientales.

    En l’an XIV, Etienne Biscaye, meunier à Sournia, épouse Marie Mathieu, fille de Jean-Pierre Mathieu, meunier à Maury et à Saint-Paul-de-Fenouillet. Alexis, et Valentin, frères de l’épouse, sont également des meuniers, et Frédéric Biscaye, fils du couple, qui épouse en 1836 Josèphe Faget l’est aussi.

    Le 10 janvier 1872, sa veuve donnera à ses deux fils (meuniers) Antoine et Joseph, la moitié du moulin. L’autre moitié, revient à leur frère, Frédéric dit François et à leur sœur Joséphine, épouse de Justin Marie, greffier à Thuir.

    L’acte décrit : « une usine appelée le moulin de Latour sise sur le territoire de Latour de France composée d’un moulin à farine, de divers locaux servant d’habitation, d’une cave mais aussi d’écurie, de grenier à foin et d’une cour… le tout ne formant qu’un corps de bâtiment, qui confronte au ruisseau dit de la Plaine (ledit ruisseau appartenant à Madame Jouy d’Arnaud) et au chemin de grande communication numéro neuf.

     Le 25 août 1874 et le 18 janvier 1876, Antoine (meunier) et Joseph Biscaye (garçon boulanger) rachèteront à leur frère et sœur le reste du moulin : « les vendeurs, cèdent à leurs frères leur partie de droits indivis sur l’héritage de leurs parents, y compris sur le moulin de Latour, son canal d’amenée et ses dépendances ». Cette partie avait été attribuée, lors du partage de 1872, aux quatre héritiers de feu Frédéric Biscaye et de Josèphe Faget son épouse.

     Voilà donc maintenant les frères Biscaye copropriétaires du moulin. Mais ils ne le resteront que quelques années.

    Le 6 septembre 1878, ils revendent, le moulin à un groupement de quatorze propriétaires constitué de messieurs : Justin Cazenove, Paul Bourdaneil-Cazonat, Félicien Alquier de feu Jacques Léandre Piéchon, Paul Abet-Barbaza, Jean Sol, Alexandre Bosc, Louis Vidal, Sébastien Rousset, Baptiste Renous, Joseph Piéchon, Charles Jourda, Auguste Cazenove, Célestin Moulina, tous propriétaires et domiciliés à Latour de France.

 

Du moulin de farine à l’usine hydroélectrique et à celle de feldspath.

    Enfin de compte, les deux frères n’auront pas fait une si mauvaise affaire que ça, puisqu’ils pourront poursuivre l’exploitation du moulin à farine pendant un an de plus sans avoir à payer un fermage, à charge pour eux d’entretenir la chaussée du moulin. Ainsi donc pourront-‘ils l’esprit serein préparer leur reconversion. Le prix de vente exigible le 6 septembre 1879 est fixé à 16000 francs. 

   La période d’un an achevée, les seize propriétaires (deux nouveaux acheteurs : Charles Bourrat et Nazaire Pla, ayant rejoint l’association des quatorze premiers) louent le 22 septembre 1879 et pour 4 ans à Antoine Not, propriétaire à Latour de France et à son épouse, Catherine Benassi : « Un moulin à eau, situé, sur la commune de Latour de France, connu sous le nom du moulin de Latour, garni de quatre paires de meules, dont trois à grain et une à plâtre, avec tous ses tournants, travaillants, bluteaux, vannes et ustensiles servant à son exploitation ». Le montant de la location est fixé à 2000 francs par an, payable par trimestre anticipé de 500 francs. Le locataire du moulin est autorisé à mettre son bois dans le pailler de la maison attenante, mais elle n’est pas comprise dans la location.

     Le fonctionnement de l’association s’avèrant sans doute plus délicat que prévu, le 22 octobre 1879, soit un mois avant la fin du bail, les propriétaires, désormais au nombre de 17, vendent le tout pour la somme de 16000 francs avec jouissance immédiate à Antoine Not leur locataire.

    Domicilié au village dont il est conseiller municipal. Il exploitera lui-même le moulin jusqu’au 30 août 1894, date à laquelle, il le cède pour la somme de 22000 francs, à Madame Joséphine Catherine Lalanne. Le bien est grevé d’une hypothèque de 16000 francs au profit de Louis Chauvet, propriétaire et clerc de notaire demeurant à Latour de France.

    Madame Lalanne, paie 6000 francs le jour de la vente et s’engage à verser à Mr Chauvet dans l’année qui suit, les 16000 francs restant pour lever l’hypothèque.

    La nouvelle propriétaire, envisage de créer sur le site, une usine hydroélectrique.  Pour ce, elle constitue avec un associé, Mr Paul Massota électricien d’Elne, « La société Roussillonnaise d’électricité ». 

    L’unité de production électrique de Latour, commence à fonctionner en 1895. Bizarrement, les statuts de la société d'exploitation (La société Roussillonnaise d’électriciténe) ne seront enregistrés par acte notarial que le 07 septembre 1898.

   Ainsi prend fin l’histoire séculaire du moulin de Latour de France : il était (par le nombre de ses meules et son revenu cadastral) le plus important du Fenouillèdes.

 

Fini les vieux moulins, une nouvelle ère commence, celle de la fée électrique et des activités industrielles.

    Le moulin farinier, est toujours répertorié en 1899. Mais il semblerait que son activité de moulin farinier soit devenue incompatible avec celle de la nouvelle usine. Sa date d’arrêt de production n’est pas connue.

     L’état statistique des usines dressé en 1900, mentionne en activité à Latour de France une usine destinée à l’éclairage public, d’une force de 55 chevaux vapeur. Le moulin farinier doté d’un moteur électrique de 25 chevaux, est lui, mentionné comme désaffecté.

     Le docteur François Ecoiffier, qui avait souscrit à la création de la société 85 actions de 500 francs chacune, sur un total de 800, en devint progressivement le créancier principal, puis le propriétaire en 1911.

     La Société Industrielle Électrique Ecoiffier (I.E.E) deviendra par la suite, un des principaux fournisseurs d’électricité du Roussillon. La localité de Latour de France et d’Estagel sont branché en 1925 sur le réseau principal de la I.E.E et l’usine de Latour cesse dès lors son activité.

  • En 1935, les activités meunières, faillirent reprendre, mais la mairie n’y était pas favorable. La société Escoffier désirait se défaire du canal et vendre les installations devenues inutiles.

     Depuis plusieurs années la mairie de Latour, tentait d’obtenir une cession gratuite du canal, mais en y mettant des conditions qui firent capoter de nombreuse fois les pourparlers : celle d’une remise en bon état par le vendeur du canal, ou le versement, d’une somme de 100.000 francs pour faire en lieu et place de la société les grosses réparations necessaires et urgentes.

     Finalement, les locaux, et le canal compris, furent rachetés en 1937, par Louis-Henri Pujol, industriel demeurant à Leucate, ex-associé du vendeur, constituant son apport à la S.A « Feldspaths et Minéraux des Pyrénées ».

  • Le 07 mai 1951, la société qui poursuit son activité de broyage, cède le canal au syndicat de la plaine. (Archives études Me Nicolas Latour : acte de Me Ernest Gibrat notaire)
  • En 1955 après sa fusion avec la S.A « Feldspaths et Minéraux de Lozère » la « Société Feldspaths et Minéraux des Pyrénées » devint la « Générale de Feldspaths et minéraux », qui fût vendue en 1963, à la S.A. Baux dont le siège est à Saint-Paul-de-Fenouillet.
  • En 1982, la S.A Baux, ferme l’usine de Latour, et met le site et l'usine à la vente. La commune s'en porte acquéreur pour la somme de 150.000 francs. Mais les divers projets communaux pour sa reconversion s’avérant très difficile à mettre en œuvre, voire impossible à réaliser, la municipalité décide quelques années plus tard de revendre l’usine et le cite en l’état.

    Monsieur Jean-Pierre Ségura, en fait l’acquisition le 14 février 1986.

     Modifié profondément une première fois par l’installation de l’usine hydroélectrique, puis à nouveau, restructurés pour la création de l’unité de concassage de feldspath, les bâtiments n’avaient plus rien à voir avec le moulin d’origine.  Aujourd’hui, après d’importants travaux de réhabilitation, ils sont devenus la résidence, de Jean-Pierre et de Marie-Thérèse Ségura.

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Vue actuelle de l'ancien moulin de Latour et de ses bâtiments.

 

 

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Commentaires
A
Un super guide pour le tourisme
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